Ma parcelle est située au bord d'une route. Loin derrière, celle de mon voisin a été rachetée récemment, et les nouveaux acquéreurs souhaitent passer par chez moi pour accéder à leur terrain, prétextant que le leur est enclavé. En ont-ils le droit ?
Date de publication : 14 novembre 2025
La question posée est celle des servitudes de passage. En France, le droit de propriété est absolu, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par la loi. Parmi ces lois, il existe ce que l’on appelle la notion de servitude.
Qu’est-ce qu’une servitude de passage concrètement ?
Une servitude est une contrainte juridique exercée sur une propriété, plus exactement sur un terrain en l’occurrence (appelé aussi “fonds”). L’une des servitudes les plus courantes (et aussi les plus âprement discutées) est celle de la servitude du droit de passage.
Une servitude de passage permet, dans certaines situations juridiquement reconnues, de limiter l’exercice de son droit de propriété au propriétaire d’un terrain sur une partie déterminée (interdiction de construire dessus ou de faire pousser des plantations par exemple) de manière à pouvoir laisser le voisin le traverser pour accéder à chez lui ou au contraire en sortir.
Le fonds servant est le fonds du propriétaire sur lequel s’exerce la servitude, autrement dit le terrain où a lieu le passage. Le fonds dominant est le fonds au profit duquel cette servitude s’exerce, donc le ou les personnes qui peuvent passer.
Il y a plusieurs façons de voir une servitude de passage s’établir :
• une servitude peut être établie dans les titres de propriété (de vente, ou au service de publicité foncière) ou plus simplement par un accord écrit entre les concernés
• elle peut s’établir par division d’un fonds appartenant au même propriétaire (servitude par “destination du père de famille”)
• elle peut s’établir pour cause d’enclave.
Elle ne peut en revanche pas s’établir pour cause de prescription trentenaire.
En d'autres thermes, ce n'est pas parce que l’on est passé 30 ans sur le terrain en question, sans aucune contestation, que cela donne naissance à une servitude. Il s’agit en général d’une simple tolérance de passage auquel un propriétaire peut mettre fin.
À quoi fait référence la situation d’enclave ?
Dans le cas présent, seul la cause d’enclave nous intéresse. La loi française permet à un propriétaire dont le terrain n’a pas accès à la voie publique (parce qu’il est entouré d’autres terrains par exemple), ou qui dispose d’un accès insuffisant, de se voir ouvrir un passage sur les autres terrains environnants.
Ce droit de passage doit être pris sur le côté le plus court par rapport à la voie publique, de manière à ce qu’il soit le moins dommageable pour les parties concernées.
Cependant, l’assiette (= l’emplacement) de la servitude peut être déterminée par 30 ans d’usage continu, et peut donc être différente de l’endroit le plus court où devrait être exercée la servitude. En effet, il existe une subtilité en droit : si le principe même de l’existence d’une servitude ne peut pas être acquise par 30 ans d’usage continu, la détermination de son assiette, elle, peut l’être en revanche. Cet usage continu doit être prouvé par la partie qui cherche à s’en prévaloir.
Les voisins concernés par ce type de problème peuvent être amenés à discuter pour convenir amiablement d’un droit de passage (par écrit), car une procédure en justice pour faire reconnaître une servitude coûte cher et peut être longue.
S'inscrire à l'info-semaine
Pour recevoir chaque vendredi une actualité juridique en matière de logement, vous pouvez vous inscrire ici !